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Olga Sorokina
by Modem – Posted October 19 2010
© Modem

Olga Sorokina ou celle qui a réveillé la maison de couture Irfé après un sommeil de presque 80 ans.

D’où venez-vous et comment avez-vous ressuscité une marque au passé prestigieux comme Irfé?

Olga Sorokina : Pendant plusieurs années j’ai travaillé comme mannequin à Londres, à New York et à Berlin. Irfé est mon premier projet en tant que directrice artistique. Tout a commencé lorsque j’ai rencontré en 2006, Xénia Cheremetieff-Sfriri, la petite-fille du prince et de la princesse Félix Youssoupoff. Ce couple, réfugié à Paris de la Révolution russe, avait fondé la maison de Couture Irfé en 1924. Leurs modèles avaient une ligne moderne et androgyne, parfaitement dans la ligne du style «à la garçonne » qui faisait fureur à l’époque. Le grand succès d’Irfé » a duré quelques années avant que la crise boursière en 1929 a contraint le couple princier à fermer la maison en 1931. Cette rencontre avec leur petite-fille m’a donné l’idée de réveiller cette maison parisienne et lui donner un souffle moderne. Je ne m’attendais à cette aventure mais parfois les rencontres peuvent changer un destin.

Vous n’êtes pas à votre première collection pour Irfé…

O.S. : La première collection que nous avons présentée en juillet 2009 au Palais de Tokyo était consacrée à la renaissance de la marque, presque 80 ans après sa fermeture. Il y avait des robes en soie et fourrures inspirées des années 20 et 30, fidèles à l’esprit de la marque et d’après les dessins qu’on a retrouvé dans le Vogue de l’époque.

La silhouette de la nouvelle collection est très rock avec des pantalons slim en veau velours strech, des blousons zippés à lacets en cuir et des jupes en cuir métallisé à franges. Référeriez-vous au passé de la marque en habillant les femmes modernes d’aujourd’hui ?

O.S. : Je ne vis seulement aujourd’hui ! Je ne pouvais pas me plonger dans les archives de la marque car il n’y en pas : A ce jour on a réussit seulement à trouver deux robes authentiques des anciennes collections d’Irfé, l’une est à New York à « L’institut du Costume », l’autre est à Paris chez un collectionneur privé.
Je ne veux pas figer Irfé dans un chic rétro, et pourtant, j’ai gardé et réutilisé les emblèmes aristocratiques des Princes Youssoupoff. Du coup, la seule référence au passé de la marque est la couronne qui apparaît ici et là sur les vêtements et parmi les accessoires. Sinon, j’ai choisi aussi de présenter la marque discrètement (p. ex. sur le logo et sur certains sacs) par la couleur violet, puisque les violettes étaient les fleurs préférées de la princesse Irina Youssoupoff, la fondatrice d’Irfé.

La collection est divisée entre l’esprit punk-rock très noir et l’esprit hippie/safari dans des tons beige. Comment voyez-vous la femme Irfé dans le futur?

O.S. : Je veux proposer une garde robe complète pour une femme moderne. Parfois c’est très taillé et structuré, parfois plus fin et volumineux. Les goûts de la femme Irfé varient, elle s’habille selon ses humeurs - comme nous tous, non ? Mais à partir de cette garde robe d’Irfé une femme peut assembler les pantalons, les vestes et les robes de mille façons.

Comment démarrez-vous la création d’une collection?

O.S. : Je commence à travailler sur une collection en partant du tissu. Coco Chanel avait tendance à utiliser toujours les mêmes matières. Moi j’aime bien varier, mélanger. Ce qui important pour moi est d’être dans la tendance.
Je travaille ici dans mon atelier, rue du Faubourg Saint-Honoré. Nous fabriquons les vêtements en Normandie, mais les chaussures, les sacs et les accessoires sont fabriqués en Italie, à Florence. Mais Irfé est une marque française, comme à l’origine dans les années 20, créé par des Russes à Paris.

En même temps, une marque de prêt-à-porter de luxe n’est pas seulement suiveuse de tendance mais créatrice d’un style original, n’est-ce pas ?

O.S. : Bien sûr, trouver et affirmer son propre style est primordial pour faire une collection destinée à une femme moderne.

D’où viennent vos influences…des voyages, de la rue, de l’art ?

O.S.: Ma seule inspiration est la vie quotidienne d’une femme moderne. J’observe beaucoup les gens autour de moi, leurs attitudes, leur style, leurs envies. Et comme j’ai beaucoup voyagé, ça a enrichit mon imaginaire. Je ne crée pas pour une femme concrète mais je voudrais qu’une femme se sente plus jeune et plus belle en portant des vêtements Irfé.

Comment voyez-vous, en tant que propriétaire d’Irfé, l’avenir de la marque ?

O.S. : En deux ans, depuis la renaissance de la marque, nous avons beaucoup progressé. Actuellement, la collection d’Irfé est présentée dans plus de 80 points de ventes dans le monde entier. Nos principaux marchés sont la France, la Russie et l’Allemagne. Je voudrais vendre dans d’autres boutiques multimarques encore. Nous pensons ouvrir une boutique à Paris, de relancer le parfum Irfé des années 20 et également de créer de la joaillerie signée Irfé. On verra bien !

Marcus Rothe pour modemonline

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